Madame la présidente,
Madame et Messieurs les Recteurs ou leurs représentants,
Comme chaque année, nous profitons de ce premier CIAEN pour faire un point de la rentrée avec les partenaires de l’école : parents et élus.
En effet pour les Recteurs, « tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ». Or même en voulant positiver la politique gouvernementale d’éducation, les faits sont têtus.
La rentrée est marquée par les conséquences des choix gouvernementaux : suppression massive d’emplois publics au budget 2008, inflation des heures supplémentaires, volonté de remodeler le système éducatif, nos métiers, nos services, nos statuts.
Les jeunes issus des milieux populaires seront les premières victimes de la diminution de l’offre de formation, du recentrage sur des enseignements dits fondamentaux, de l’augmentation des activités hors temps scolaire, de l’alourdissement des missions des enseignants, de l’assouplissement de la carte scolaire et de la mise en concurrence des établissements, toutes ces mesures qui vont à l’encontre de notre conception du service public d’éducation.
La suppression de 11 500 postes d’enseignants, essentiellement du second degré en cette rentrée, s’est traduite par 2 100 postes de moins dans nos académies d’Ile de France. Cette situation a été aggravée par la transformation massive des heures postes en heures supplémentaires. Cela a conduit à des suppressions très nombreuses de postes fixes dans les établissements avant les congés. Des ajustements ont du être fait durant les vacances et à la rentrée où ont été affectés des TZR parfois sur des morceaux de postes, sur plusieurs établissements. Dans le premier degré, nous avons une situation identique avec de nombreuses fermetures préalables et des ajustements de rentrée en forte augmentation.
Cette situation crée de nombreuses difficultés aux établissements, et multiplie les affectations à titre provisoire, affaiblissant du même coup la cohérence des équipes éducatives. On a même vu cette année utiliser les élèves comme variable d’ajustement, les déplaçant d’un quartier à l’autre voire d’une commune à une autre pour éviter d’ouvrir les classes et sections nécessaires, situation aggravée par la suppression croissante de la carte scolaire, qui de fait ne garantit plus à chaque enfant de bénéficier d’une place dans l’école, le collège de son quartier, ou le lycée de son secteur.
Concernant les heures supplémentaires, beaucoup de collègues notamment les plus jeunes, ont souvent été mis devant le fait accompli et subi des pressions voire du chantage ou des menaces de sanction pour se voir imposer des heures supplémentaires.
Il faut rappeler que 40% de la profession du second degré débute dans notre région, essentiellement dans les académies de Créteil et Versailles. Ainsi aux difficultés inhérentes à l’apprentissage d’un métier exigeant et complexe, s’ajoute pour une grande partie d’entre eux l’éloignement dans des académies marquées par de forts contrastes sociaux et la présence d’établissements qui concentrent les difficultés. C’est ainsi que les allègements de service d’une ou deux heures qu’ils devaient avoir pour poursuivre leur formation se traduit dans les fait par des impositions d’heures supplémentaires les mettant souvent dans des difficultés que les primes ne peuvent compenser.
Autre conséquence de cette politique perceptible tant dans le premier que le second degré est l’insuffisance des moyens de remplacements. En collège et lycée, des disciplines n’ont déjà plus aucun remplaçant disponible et 15 jours après la rentrée, il a fallu faire appel à des contractuels pour des congés longs. Nous tenons à réaffirmer que le remplacement est un besoin permanent du service public d’Education et qu’il doit être assuré par des enseignants titulaires qualifiés et formés dans la discipline du remplacement. Des étudiants vacataires embauchés pour 200h maximum, rémunérés à l’heure, sans droit à la retraite, au chômage ou à la maladie ne pourront jamais jouer ce rôle. La précarité de leur situation est incompatible avec les exigences du métier, l’implication dans les équipes pédagogiques et la réussite des élèves.
Les administratifs ne sont pas épargnés non plus puisque sur l’Ile-de-France, ils ont connu successivement près de 650 suppressions avant 2008, 125 cette année et que plus de 50 suppressions sont prévues en 2009. Ce ne sont pas les promesses de primes qui compenseront les charges supplémentaires rajoutées d’année en année, comme le millier de bourses au mérite en Ile-de-France, la gestion des manuels scolaires ou tous les crédits sociaux attribués par les collectivités alors que dans le même temps le regroupement de grosses agences comptables rend de plus en plus aléatoire une gestion de proximité.
Cette rentrée est aussi marquée par la suppression de 2h d’enseignement pour tous dans le premier degré. Cela signifie donc la décision de donner moins à la grande majorité. Ainsi le soutien scolaire est relégué hors de la classe comme une punition supplémentaire pour des élèves déjà en difficulté qui doivent arriver une demi-heure plus tôt le matin, ou partir plus tard le soir, voire prendre sur leur pose méridienne. Même situation dans le second degré où le dispositif dit de réussite scolaire est pris sur les vacances des élèves qui souvent sont les mêmes qui ne peuvent en profiter pleinement. Outre que cela pose des problèmes pour les personnels non-enseignants en ce qui concerne l’accueil et l’entretien des locaux, nous tenons à rappeler que nous considérons que la prévention de l’échec scolaire, sa remédiation doivent s’effectuer pour l’essentiel pendant le temps scolaire et le plus souvent possible dans le cadre de la classe.
Toute aussi grave est la généralisation progressive des bac pro 3 ans au nom d’une soi-disante « équité entre les voies » de formation : cette « réforme » supprime 25% du temps de formation pour les élèves qui jusqu’à présent accédait à un niveau IV. Par ailleurs la suppression massive des sections de BEP remet totalement en cause les dispositifs de remédiation à l’échec scolaire des élèves en difficulté à la suite d’une orientation souvent faite par défaut.
Cette mesure loin de revaloriser la voie professionnelle, est un élément du démantèlement du service public et conduit à la suppression d’un quart des postes de PLP. C’est probablement là qu’il faut en chercher la justification de cette réforme au détriment d’un système éducatif pour tous.
Le dernier point que nous voulons aborder concerne l’assouplissement puis la suppression à terme de la carte scolaire. Il n’y a pas eu de transparence réelle des rectorats sur cette question sinon que le nombre de dérogations augmente dans des proportions importantes. L’évitement scolaire est encouragé sans qu’il ne contribue à la mixité sociale qui était invoquée. Les établissements de départ se transforment en ghettos, les équipes culpabilisées par l’administration qui les invite à se lancer dans la concurrence. Le fait de vider certains établissements pose la question des investissements faits par la Région en matériel et en manuels scolaires notamment, et le manque qu’il peut y avoir dans d’autres. Cela pose également la question de l’équité de l’offre scolaire sur l’ensemble du territoire régional et du maintien de la mixité sociale : comment la Région apprécie-t-elle cette mesure et comment compte-t-elle régler ce nouveau problème ?
Mais cette rentrée ne fait que préfigurer ce qui va se poursuivre l’an prochain avec 13 500 nouvelles suppressions de postes et cette fois touchant tous les niveaux d’enseignements. Les pistes avancées ne peuvent que nous inquiéter. Dans le premier degré, c’est la suppression des réseaux d’aide qui est programmée et ainsi les deux heures de cours supprimées pour tous et transformées en pseudo soutien permettraient d’économiser 8 000 postes. Quand au second degré, le ministre table sur la réforme de la classe de seconde qui doit entrer précipitamment en vigueur à la prochaine rentrée avec la diminution de près d’un tiers des heures d’enseignement et l’organisation en modules semestriels qui lui permettrait d’économiser 4 000 postes.
Ces réformes pilotées uniquement par l’économie et la décision maintenant effective de ne remplacer qu’un départ à la retraite sur deux mettent dramatiquement en péril l’éducation de la jeunesse, notamment celle des milieux populaire si nombreuse dans notre région.
Nous pensons que c’est tous ensemble, parents, élus, personnels de l’éducation que nous devons nous y opposer. C’est le sens qui a été donné à la grève initiée par le SNES, le SNUEP et le SNEP dans le second degré le 7 octobre et de la manifestation nationale unitaire de toute l’éducation qui se déroulera à Paris, avec les parents d’élèves et les lycéens le 19 octobre.